SCI à l’IS : attention à la CRL !

Dans un contexte de durcissement et d’instabilité de la fiscalité de la location meublée, nombreux sont les propriétaires qui sont tentés par la solution de la SCI soumise à l’impôt sur les sociétés (« IS »). Ce mode de détention présenté comme étant la panacée par certains jouit d’un certain nombre d’avantages :

  • permet une certaine prévisibilité fiscale grâce à un régime relativement stable ;
  • permet aux particuliers propriétaires d’un immeuble nu de ne pas être imposés au titre des revenus fonciers en tant que personne physique ;
  • offre la possibilité de ne pas appréhender les résultats réalisés par la SCI et de laisser ainsi en réserves les résultats à des fins de capitalisation ou de financement de projets futurs ;
  • atténuer (du moins au départ) la fiscalité du montage en bénéficiant des règles de calcul de l’IS qui permettent de prendre en compte la déduction liée à l’amortissement des immeubles.

Toutefois, en plus des inconvénients les plus connus de ce schéma (plus-value majorée des amortissements pratiqués antérieurement et absence d’abattement sur la plus-value pour durée de détention, à l’inverse d’une SCI à l’IR), les contribuables oublient souvent que le choix de la SCI à l’IS rend dans la plupart des cas applicable la contribution sur les revenus locatifs (« CRL »).

La CRL : dans quelles situations ?

La CRL est due principalement par : 

  • les personnes morales passibles de l’IS ; et 
  • les sociétés de personnes (et assimilées) dont un membre au moins est soumis à l’IS dans les conditions de droit commun. Pour les sociétés et groupements relevant du régime des sociétés de personnes, la présence d’un seul associé assujetti à l’IS conduit à l’assujettissement de la société à la CRL sur la totalité des loyers perçus, cette condition étant appréciée à la clôture de l’exercice (BOI-RFPI-CTRL-20-10 n° 50).

Les personnes physiques et les sociétés de personnes (et assimilées) dont aucun membre n’est soumis à l’IS dans les conditions de droit commun échappent, quant à elles, à cette contribution.

Par ailleurs, la CRL n’est applicable qu’aux revenus tirés de la location de locaux situés dans des immeubles achevés depuis 15 ans au moins au 1er janvier de l’année d’imposition. Autrement dit, la CRL n’est exigible au titre de 2023 que si les locaux sont situés dans des immeubles achevés au plus tard le 31 décembre 2007.

En pratiques sont exonérées :

  • les SCIs assujetties à la TVA ;
  • les SCIs dont le montant annuel des loyers par local, n’excède pas 1.830 € au cours de la période d’imposition à laquelle ils sont rattachés ;
  • certains revenus des locations d’immeubles faisant partie de villages de vacances ou de maisons familiales de vacances agréés.

Une imposition non négligeable

Pour les contribuables concernés, les conséquences ne sont pas négligeables car la CRL est applicable annuellement au taux de 2.50 % du montant des loyers bruts encaissés par la SCI.

Au regard de notre expérience l’opportunité du choix de la SCI l’IS doit s’arbitrer en tenant compte de certaines contraintes et réserves. En effet, le choix de l’IS impacte de manière inéluctable la fiscalité du dénouement de l’opération et doit faire l’objet d’une analyse au cas par cas.

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TVA sur la marge : cession par un lotisseur…

Le Conseil d’Etat vient de confirmer qu’en cas de vente de terrains à bâtir par un lotisseur, pour déterminer le prix de revient de chaque lot, le professionnel était fondé à prendre en compte le coût des parcelles cédées à la commune pour l’euro symbolique dès lors que :

  • ce transfert était une condition de réalisation de l’opération de lotissement ; et
  • que les parcelles en cause faisaient partie de l’ensemble immobilier acquis en vue de sa réalisation.

« Il résulte des dispositions précitées de l’article 268 du code général des impôts que, dans le cas de revente par lot d’un immeuble ou d’un terrain à bâtir acheté en une seule fois pour un prix global, chaque vente de lot constitue une opération distincte, à raison de laquelle le vendeur doit acquitter une taxe calculée sur la base de la différence entre, d’une part, le prix de vente de ce lot et, d’autre part, son prix de revient estimé en imputant à ce lot une fraction du prix d’achat global de l’immeuble ou du terrain.

Il appartient au contribuable de procéder à cette imputation par la méthode de son choix, sous réserve du droit de vérification de l’administration et sous le contrôle du juge de l’impôt. Ces dispositions ne permettent pas au contribuable, dans le cas où la vente d’un lot s’effectue à un prix inférieur au prix de revient, de déduire la moins-value résultant de cette vente de la base d’imposition dégagée par d’autres ventes.

Toutefois, ces règles ne s’opposent pas à ce que le contribuable impute sur le prix de revient de chacun des lots vendus une fraction du prix d’acquisition des terrains cédés gratuitement ou pour l’euro symbolique à une commune en vue de la réalisation d’aménagements de voirie, lorsque cette cession conditionne la réalisation de l’opération immobilière.« 

Arrêt du Conseil d’Etat du 13 Octobre 2021, n°433745

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Imposition du bailleur sur les constructions et aménagements réalisés…

CE 19 mai 2021, n°429332, SCI Saint Léonard

Constatant que la SCI Saint Léonard avait consenti un bail portant sur un ensemble immobilier à usage commercial prévoyant que le bailleur, en fin de bail, conserverait sans indemnité « tous embellissements, améliorations et installations faits par la partie preneuse  » et que le locataire avait fait exécuter sur l’immeuble loué des travaux, le Conseil d’Etat confirme l’analyse de la Cour administrative d’appel de Nantes, selon laquelle la société Hathor, en sa qualité d’usufruitière des parts de la SCI Saint Léonard, était imposable, au titre du complément de loyer né de la remise gratuite de ces travaux à la résiliation du bail, à proportion de ses droits dans la SCI bailleresse. 

Vient ensuite la question du montant du profit à retenir au niveau du bailleur (i.e. la SCI).

Deux modes de détermination du profit auraient pu être envisagés :

  • soit ce profit correspond au coût de revient de ces aménagements ou constructions (approche « coût chez le preneur ») ;
  • soit ce profit correspond au surcroît que ces éléments confèrent à la valeur vénale de l’immeuble (approche « profit chez le bailleur »). 

Le Conseil d’Etat a tranché en retenant la seconde méthode. Ainsi, pour évaluer le complément de loyer imposable, il convient d’apprécier si la réalisation de ces travaux confère au bien un surcroît de valeur vénale à la fin du bail. La solution apparaît logique et doit être saluée. En effet, le coût de revient au niveau du preneur peut dans certains cas être sans aucun rapport avec le profit que le bailleur est susceptible d’en retirer. Or c’est bien ce profit qu’il convient d’imposer.

Vincent Vialard - Avocat fiscaliste